Le Parc Naturel Régional du Pilat est un massif de moyenne montagne qui s’étend au sud-ouest de Lyon, à la frontière des départements du Rhône et de la Loire. C’est une région naturelle de 700 km², riche d’un passé parfois tumultueux qui lui a donné un patrimoine historique particulièrement intéressant. Parmi tous les Parcs Naturels de France, le Pilat offre la situation unique d’être entouré d’une couronne urbaine de plus de deux millions d’habitants, lui garantissant une fréquentation touristique permanente, été comme hiver. Son altitude permet en effet la pratique des sports d’hiver nordiques. Saint-Étienne, Saint-Chamond, Rive-de-Gier, Givors, Lyon, Vienne et Annonay en constituent les « villes portes » les plus importantes. Sa bourgade principale est Pélussin, siège administratif du Parc. Au cœur de la forêt de Pélussin, à plus de mille mètres d’altitude, se trouve la chapelle Sainte-Madeleine, un humble édifice niché au fond des bois, souvenir d’un modeste monastère où vécurent quelques ermites. On y voyait, jusqu’en janvier 2001, ce fameux tableau dont le vol fut très médiatisé, puisqu’il suscita même une émission de radio sur France-Culture ! Ce tableau est à l’origine de l’hypothèse « dite » du Pilat, qui relie de façon un peu fantasmagorique l’affaire Rennes-le-Château à cette montagne. En réalité, il y aurait d’autres liens beaucoup plus subtils. ![]() ![]() Entre Vienne et Pélussin, citées reliées par une voie romaine, on voit encore les ruines d’une ferme nommée « la Grande Magdeleine ». Une grange plutôt, rattachée à la ferme du même nom qui existe toujours un peu plus bas. Cet endroit est tout proche du Col du Pilon, nom qui n’est pas sans évoquer celui du Saint-Pilon, le sommet dominant la grotte de la Sainte-Baume où selon la tradition provençale la sainte pécheresse aurait fini ses jours. Il existait au pied du Pilat, coté nord, une autre chapelle Sainte-Madeleine, qui avait succédé à une taverne gallo-romaine, à l’emplacement utilisé par les muletiers pour franchir la rivière le Gier, alors assez capricieuse. Cette chapelle fut rebâtie en style gothique par les Roussillon, lorsque ces héritiers d’une puissante famille du Dauphiné s’installèrent dans la région. Dominant la chapelle, le manoir de Châteauneuf appartenait à Guillaume de Roussillon, seigneur d’Annonay, Riverie, et autres lieux circonvoisins. Chargé par le concile de 1274 de partir en Terre Sainte afin d’assurer — dit-on — le repli des Templiers, Guillaume se battit jusqu’à la mort. Il légua à son épouse Béatrix de la Tour, en guise de douaire, le manoir de Châteauneuf. Béatrix était issue elle aussi d’une puissante famille, celle des Dauphins du Viennois, ce qui était le titre porté par les comtes de Vienne. C’était un surnom, que l’épouse du premier comte, d’origine anglaise, avait donné à son fils. « Dolphin », nom familier et tendre donné aux jeunes garçons, était alors courant en Angleterre. Ce surnom était devenu le titre porté par les comtes de Vienne, et c’est depuis cette époque que la région se nomme le « Dauphiné ». ![]() La chartreuse de Sainte-Croix-en-Jarez prospéra et s’agrandit, jusqu’à la Révolution Française qui en chassa les moines. Vendu comme bien national, le monastère est devenu une commune, et un village unique en Europe puisqu’il n’a pas de rues mais est composé de deux énormes corps de bâtiments, ouverts sur deux cours intérieures, reliés par un long corridor. L’intégralité du village est aujourd’hui un Monument Historique, et la commune a mérité le label « l’un des plus beaux villages de France ».
Beaucoup d’anciennes chartreuses sont entourées d’une certaine aura de mystère, et Sainte-Croix-en-Jarez, plus que toute autre peut-être, n’échappe pas à la règle. « On dit » que sous les capuches des moines se seraient cachés quelques visages burinés de Templiers. « On dit » que la chartreuse fut choisie comme le lieu discret d’un dépôt sulfureux. « On dit » que l’un de ses prieurs, le fameux Dom Polycarpe de la Rivière, aurait trouvé ce dépôt. « On dit » qu’il l’utilisa pour écrire des ouvrages historiques tous condamnés par l’autorité ecclésiastique. Il est vrai que cet homme était particulièrement énigmatique. Né vers 1585 dans le Velay, il avait passé son enfance à la cour de Marguerite de Valois, au château d’Usson en Auvergne. Entré en religion, il avait été le procureur de la chartreuse de Lyon de 1616 à 1618. Là, il avait rencontré Balthazar de Villars, bienfaiteur de la chartreuse, mais surtout continuateur de l’œuvre de son beau-père Nicolas de Langes, la fameuse « Société Angélique ». Cette société secrète littéraire rassemblait les lettrés, les artistes, et organisait la transmission d’une certaine Connaissance. Dom Polycarpe fut ensuite le prieur des chartreuses de Bordeaux et de Bonpas (Vaucluse), puis il disparut mystérieusement en se rendant en cure au Mont-Dore. « On dit » que, vexé, il quitta la vie religieuse pour se retirer « quelque part » dans le sud de la France. « On dit » qu’il s’était fortement intéressé à Ponce Pilate, à une certaine royauté secrète, au Graal, aux Mérovingiens, et surtout à une certaine sainte pécheresse… « On dit » que ce sont autant d’éléments que l’on retrouve en filigrane dans l’affaire Rennes-le-Château. Mais que ne dit-on pas ?
Patrick Berlier Retour à la liste des articles |